pdlt : La photo à l’ère du numérique
La photo à l’ère du numérique. Place de la Toile, 28.09.2013
avec Laurence Allard (Lille 3)
Jean-Christophe Béchet (Réponses Photo)
André Gunthert (EHESS)
http://www.franceculture.fr/emission-place-de-la-toile-la-photo-a-l-ere-du-numerique-2013-09-28
La photo a connu deux mutations majeures (outils, usages) :
- La dématérialisation de l'image (l'abandon de l'argentique). L'image peut être indexée, circuler dans les tuyaux et être industrialisée.
- Les réseaux sociaux. L’album familial a perdu son monopole, les photos sont visibles sur le web (en numérique, Facebook c'est le plus grand album du monde)
Avec le progrès, tous les appareils numériques permettent de filmer des vidéos. Mais majoritairement les internautes continuent de prendre des photos (une exception : les snapchat, les vidéos en 6 secondes)
La photo a gagné ses galons artistiques tout en devenant un outil de masse. Les galeries sont un des débouchés naturels des photographes de métier.
Ces mutations obligent à repenser le domaine.
- L'opposition pros-amateurs n'est plus défendable.
Au temps de Kodak dominant, au sein de l’entreprise les secteurs photo amateur / photo professionnel ne se parlaient pas. Quand Andrew Keen parle de « culte des amateurs », c’est pour le dénigrer.
Aujourd’hui, Béchet distingue photos à usage familial, photos à but lucratif, photo à visée esthétique.
- La technique a longtemps été un marqueur (et un moyen pour les pros de se distinguer des autres, par l’argent et par les discours entre initiés en cercles restreints).
- Qui a mis un appareil photo dans un téléphone ?
Au départ, c'est un gadget, le premier modèle d’iPhone a un appareil médiocre (2 M de pixels) et ne communique pas en 3G. Il ne peut servir de support à un modèle conversationnel.
Mais les internautes se sont appropriés ce gadget. Du coup, il est devenu normal de faire des photos avec un téléphone et de les envoyer à ses proches (à l’âge de la publitude, ce qui a le plus de valeur, c’est ce que l'on garde pour soi). Un media nait toujours deux fois : avant l’iPhone, Laurence Allard cite Philippe Kahn en 1997 et la naissance de sa fille.
Avec le smartphone et la convergence électronique, la photo est intégrée dans des outils polyvalents, qui servent à autre chose. Cette intégration aurait pu tuer la photo ; elle la rend en fait beaucoup plus forte grâce à la conversation.
Une question porte sur les mutations formelles, sur les nouvelles formes explorées ou inventées.
Pour AG, la vraie révolution est plus basique : c’est que la photo est utilisée comme un langage avec une puissance incroyable. Il reste à inventer une linguistique des images.
L'image est utilisée comme un langage. Le web, c’est de la micro-édition. Avec le web, on est tous des éditeurs, on fait des montages, des choix d’image, de texte, de contexte qui donne le sens de l’image. L'image est annotée, légendée, dédicacée. Ce travail qui était assuré par des pros, aujourd’hui, tout le monde peut apprendre à le faire. L’image n’est plus seulement un élément de conversation mais un embrayeur de conversation. Si sur Facebook, l’image que vous avez publiée produit des réactions et une conversation, vous avez gagné au jeu social. C’est le but du jeu, c’est fondamental.
La photo n’est pas seulement une technologie, c’est aussi une pratique sociale. Dans un album ancien, on met des photos de mariage, d'anniversaires, presque jamais des photos d'enterrement. L’album est un outil de présentation de soi dans lequel on ne garde qu’une histoire heureuse. Le numérique a multiplié les grilles d’occasions de photographier.
Il y a un moment où on photographie tout le temps, c’est quand on est touriste. L’exotisme de la situation fait que tout est intéressant.
Le smartphone nous change en touristes du quotidien
L'intégration de la photographie fait de nous des touristes du quotidien.
JCB ajoute la gratuité, l’instantanéité, la capacité de transmettre en temps réel...
La photo et le réel ?
L'image a longtemps été utilisée comme preuve. On sait aujourd’hui que c’est faux. On sait travailler les photos, les recadrer, éditorialiser les contenus... Faut-il regretter cette croyance illusoire dans la photo comme copie du réel ?
Un paradoxe : on met de plus en plus de photos sur le web, mais quand un photographe travaille dans la rue ou sur une plage, il se fait rapidement expulser. L’image fixe est rejetée de l’espace public, mais si une caméra de TV apparaît, tout le monde veut être dans l’image (animée).
Etre touriste du quotidien est-ce devenir étranger à sa vie ?
« Photographier la Tour Eiffel, pour quelqu’un qui ne l’a jamais vue, signifie à la fois s’approprier un monument de la culture mondiale et prouver sa participation individuelle à cet espace commun ».
André Gunthert, La photographie, monument de l’expérience privée - 29.09.2012
http://culturevisuelle.org/icones/2514
AG cite également Gombrich, « L’image visuelle » : « en 1972, la totalité du paysage visuel décrit par Gombrich - pub, médias, télé - est manufacturé. Or, la production personnelle n’est pas assimilable à la production médiatique. Produire ses propres représentations, c’est mieux contrôler son quotidien. Faire d’autres images du monde, les siennes, les partager et les commenter sur les réseaux sociaux, ce n’est pas se rendre étranger au monde, c’est au contraire contribuer à se le réapproprier ».
Laurence Allard, Qu’est ce qu’une photo à l’ère du numérique et du téléphone mobile ? 29.09.2013
http://www.mobactu.fr/
André Gunthert, Place de la Toile fait le point sur la photo numérique
http://culturevisuelle.org/icones/2808
André Gunthert : « Plutôt que les questions de créativité, l'enjeu, c'est de comprendre que la photo est devenue un langage ... »
https://twitter.com/search?q=%23pdlt&src=hash
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