Le médiéviste et le temps présent
- Patrick Boucheron : «Un médiéviste est bien armé pour comprendre le présent » - Libération 26.12.2013
http://www.liberation.fr/culture/2013/12/26/un-medieviste-est-bien-arme-pour-comprendre-internet_969055
PB vient de publier Conjurer la peur - Sienne, 1338. Essai sur la force politique des images
http://www.fabula.org/actualites/p-boucheron-conjurer-la-peur_59553.php
extraits :
« Curieusement, l'histoire des communes italiennes (et de leur opposition au pouvoir personnel de la seigneurie) ne fait pas partie de notre généalogie politique. Dès qu’on fait une révolution en Europe, on se drape dans une toge gréco-romaine. L’expérience des communes médiévales a été en partie occultée. Ce moment est vu comme incertain, contradictoire, à la manière d’un faux départ. Seule l’historiographie romantique et la Commune de Paris redonneront vie à ce modèle ».
« il serait illusoire de penser que la fresque du bon gouvernement nous donne une idée précise du XIVe siècle, d’abord parce qu’il y a eu des restaurations successives qui ont transformé et réinterprété l’œuvre. Et, même si la matière picturale était intacte, entre elle et nous s’interposerait l’ombre de tous les regards qui se sont posés sur elle. Il nous faut donc décaper toutes les strates d’interprétations ».
« L’art politique n’est évidemment pas à la Fiac, il est dans la rue, dans un espace public .... Curieusement, j’ai l’impression aujourd’hui qu’un médiéviste est mieux armé pour comprendre le Street Art qu’un spécialiste du Caravage, la parenthèse du régime esthétique s’est comme refermée. Idem pour Internet, un médiéviste sait comment se dissémine un texte sans auteur. Il n’y a pas un manuscrit médiéval qui ne soit composite (ou collaboratif). Le Moyen Age est devenu une source d’intelligibilité pour le présent ».
- Patrick Boucheron, L’éloignement hautain de l’oligarchie - entretien - Le Monde 26.12.2013
http://www.lemonde.fr/technologies/article/2013/12/26/l-ecart-entre-gouvernants-et-gouvernes-atteint-un-maximum_4340395_651865.html
« L’éloignement hautain de l’oligarchie et des gouvernants est le principal danger des systèmes politiques ».
« Longtemps, en Europe, la nécessité pour les élites de vivre entourées de leur clientèle faisait obstacle à la ségrégation urbaine. Il y avait certes des quartiers pauvres, mais pas de quartiers riches. Au XVe siècle, les Médicis – qui étaient immensément riches – habitaient dans un palais au cœur de Florence qui demeurait ouvert aux clients et aux obligés ».
« Aujourd’hui, les élites sont sur la pente ascendante dangereuse de la toute-puissance. L’écart gouvernants-gouvernés atteint peut-être l’un de ses maxima historiques »
Ambrogio Lorenzetti, La fresque du bon gouvernement (détail) Web Gallery of Art
http://www.wga.hu/frames-e.html?/html/l/lorenzet/ambrogio/governme/index.html
Rappel :
Joseph Morsel - " L'Histoire (du Moyen Âge) est un sport de combat " (2007)
(avec Christine Ducourtieux pour la médiévistique et l'Internet)
http://clioweb.free.fr/chronique/aphg404.pdf
http://lamop.univ-paris1.fr/W3/JosephMorsel/index.htm
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Séparer les pouvoirs ?
Séparer les pouvoirs, une idée dépassée ? Entretiens du jeu de Paume, du 17 au 19 juin
http://www.lemonde.fr/idees/2011/06/17
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Mieux contrôler l'exécutif, voilà la liberté des modernes ! Pierre Rosanvallon, prof au CdF
http://www.lemonde.fr/idees/
Pour P Rosenvallon, il faut « contrecarrer la tendance permanente du pouvoir en général (exécutif) à s'exercer sans contrepoids et à se présenter comme seul légitime. Contre cette double prétention, il est nécessaire de reformuler les termes d'une nouvelle architecture des pouvoirs. Mais plus que d'une séparation ou d'une balance de ceux-ci, c'est en termes de complication, de démultiplication et de distinction des fonctions et des formes démocratiques qu'il faut raisonner ».
En France, « le pays qui n'a cessé d'osciller dans son histoire entre démocratie illibérale et libéralisme antidémocratique », P Rosenvallon propose de « démultiplier les modes d'expression de la volonté générale » et de « donner à l'opposition tous les moyens nécessaires pour qu'elle joue son rôle de stimulation et de contestation ».
- Nous vivons sous le régime de l'oligarchie financière,
Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, sociologues.
Le président des richies, http://clioweb.canalblog.com/tag/pincon
- Médias et politique : liaisons dangereuses
Cynthia Fleury, philosophe
- Un procureur général de la nation doit être instauré, indépendant du politique,
Jean-Louis Nadal, procureur général
- Le juge constitutionnel, un indispensable contrepoids au pouvoir,
Renaud Baumert, prof droit public
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Un 18 juin, l'occasion d'interroger le mythe gaullien
http://clioweb.canalblog.com/tag/gaullien
et de faire relire un classique de 1964
http://clioweb.canalblog.com/tag/coupdetat
Le président des riches
A lire Le président des riches,
Enquête sur l'oligarchie dans la France de Nicolas Sarkozy,
l'ouvrage de Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot
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L'éditeur Zones propose un accès gratuit au contenu du livre.
Que cela ne vous empêche surtout pas de l'acheter (14 euros).
http://www.editions-zones.fr/spip.php?page=lyberplayer&id_article=116
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dans le chapitre Les mots pour ne pas le dire, pages 153-154 :
« L’héritage de Mai 68 a introduit le cynisme dans la société et la politique » déclarait d’un ton assuré le candidat S le 29 avril 2007 au cours de son dernier meeting de campagne électorale…
« Étonnant. NS est imprévisible. Il donne à voir la détermination et la rouerie du pouvoir. Dans un double langage permanent, il a réussi la gageure de rester l’ami des plus riches tout en se faisant passer pour le défenseur de « la France qui se lève tôt ». Flatter le bon peuple en remplissant les poches des nantis. De la poudre aux yeux pour les uns : «Les paradis fiscaux, c’est fini ! », et des milliards d’euros pour les plus riches. Le sens des mots, dans cette guerre psychologique qui ne dit pas son nom, est volé et détourné.
Changement ? Réforme ? Rupture ? … On allonge la durée du travail, on démantèle les services publics, on brise l’indépendance de la justice, on livre les entreprises publiques au privé, on rabote les droits sociaux, on privatise les fonds de retraite, on gave les gavés. Le changement est régression. La classe dominante veut démanteler, grâce à son porte-parole aujourd’hui à l’Élysée, les acquis des luttes sociales et réduire à sa merci le peuple de l’économie réelle en vilipendant, l’œil rigolard, un capitalisme financier qui n’a guère l’air de s’en s’émouvoir…
« Comment les Français peuvent-ils se retrouver dans une politique qui se contredit entre les propos tenus et les résultats obtenus ? Les discours de NS déroutent car ils font un usage systématique de l’oxymore, une figure de style qui allie des termes contradictoires dans un rapprochement paradoxal. La «flexisécurité», le « développement durable » sont un moyen de « rapprocher, d’associer, d’hybrider et/ou de faire fusionner deux réalités contradictoires [...] les oxymores ainsi utilisés peuvent favoriser la déstructuration des esprits, devenir des facteurs de pathologie et des outils de mensonge ». L’UMP, le parti du président, signifie «Union du mouvement populaire» alors que c’est à Neuilly que l’électorat lui est le plus favorable, avec 83,3 % des voix au second tour des régionales de 2010... « Si le pouvoir de NS fait rupture, écrit Bertrand Méheust (La politique de l’oxymore), c’est bien par un usage cynique, à ce jour sans précédent dans la démocratie française, des techniques de communication ... ».
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- Table des matières de l'ouvrage :
Le Fouquet's
Les riches, premiers servis
Une oligarchie au pouvoir
La télévision : les guignols de la Pub
NS, avocat d'affaires
État, famille, couple : le mélange des genres
(le népotisme comme mode de gouvernance)
Interlude : promenade en sarkozie
Les mots pour ne pas le dire
Conclusion : Que faire ?
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- Le couple qui fait trembler l'Elysée, Monique et Michel Pinçon, sociologues.
Entretien publié dans Télérama 3166 - 18/09/2010.
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- L'émission Là-bas si s'y suis du 06/09/2010 accueille les auteurs. L'enregistrer et l'écouter en différé.
Vers la 31e mn, on y parle d'un groupe social très conscient de son grand pouvoir, de ses intérêts particuliers et des moyens de les défendre et de les accroître (le pouvoir de chacun est décuplé par celui de tous les autres). En somme, il existe encore une classe sociale... (L'affaire Woerth-Bettencourt, c'est une illustration parfaite de la collusion dans cette classe sociale, entre ceux qui font de la politique, ceux qui communiquent, ceux qui font des affaires).
Vers la 35e mn, « Il faut donner à Pécresse, elle veut être présidente de Paris, elle va perdre, mais il faut qu'on montre que vous la souteniez, c'est le maximum légal, cela n'est pas cher, et ils apprécient... » dit un proche de Mme Bettencourt.
NS tranche avec la discrétion usuelle de cette oligarchie. Il assume avec un culot sans limites (jusqu'au cynisme ?) une énorme soif personnelle de pouvoir. (vers la 38e mn : 12/07/2010: « Mr Pujadas, vous êtes un journaliste trop sérieux pour vous laisser aller à des formules. Posez-moi des questions, Je vais vous répondre, Je n'ai rien à cacher... »
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- Monique Pinçon-Charlot était invitée de l'émission Ce soir ou jamais le 15/09/2010.
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- dans Médiapart, article La révolution culturelle de deux spécialistes de la bourgeoisie (14/09/2010),
également Visite guidée de Chantilly, « kolkhoze » de riches...
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- Guerre des classes, népotisme, mélange des genres, fédérateur de l’oligarchie à la française… Le compte rendu du Monde (07/09/2010)
- Conclusion de l'entretien publié par Télérama :
« Que faire des riches ?
Suivre leur exemple.
Voilà des gens qui ont une éminente conscience de leur classe, qui sont solidaires quand la mode est à l’individualisme, qui sont organisés et mobilisés, qui défendent énergiquement leurs intérêts.
Faisons comme eux.
Battons-nous ! »