01 avril 2016

Médias sociaux et engagement militant

 

Pourquoi les médias sociaux ne changent-ils pas le monde ?
Circulation virale de l'information ou engagement militant ?
Hubert Guillaud, internetactu, 31.03.2016
http://www.internetactu.net/2016/03/31/pourquoi-les-medias-sociaux-ne-changent-ils-pas-le-monde

à partir de l'article
Beyond Viral By Manuel Cebrian, Iyad Rahwan, Alex "Sandy" Pentland
Communications of the ACM, Vol. 59 
http://dl.acm.org/citation.cfm?id=2907055


extraits : 
« La prolifération de l’usage des médias sociaux n’a pas abouti à un changement social durable et réfléchi significatif »

« Pour les chercheurs, les médias sociaux commerciaux (parce qu’ils sont commerciaux) ont un « biais de viralité », qui conduit la recherche elle-même à se concentrer sur la dynamique de diffusion de l’information, plutôt que sur le recrutement à l’action ».

« Convaincre quelqu’un est une chose, mais le recruter, l’engager à soutenir une cause exige plus de temps, d’efforts et de risques »
«  Pour les chercheurs, l’enjeu ne semble pas tant de trouver des configurations sociales simplifiées ou des modes pour disparaître des réseaux… que d’interroger les questions d’incitations et de participation, de concentration plus que de dilution, d’engagement et d’activité ».


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01 octobre 2015

Internet en Chroniques

 

En cours de rédaction de la Chronique internet 432, reproduction d'un billet du 21.11.2010,
un abécédaire dont l'essentiel reste valide, y compris à l'âge du smartphone et de l'Internet mobile



Internet en Chroniques

paru l'Abécédaire, Historiens & Géographes n° 412
version html : http://clioweb.free.fr/chronique/abecedaire/abcd.htm

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Le succès actuel d’Internet est incontestable. Les derniers manuels de seconde en attestent. Les enseignants, par choix ou sur commande, ont appris à tirer parti de L’alchimie des multitudes  (F Pisani) dans la préparation de leurs cours et en classe. Des premiers SIL’Z aux réseaux actuels à haut débit, que de chemin parcouru ! Entre 1997 et 2010, plus de cinquante Chroniques ont accompagné cette progression des usages d’Internet en Histoire et en Géographie.
(En 2005, un point sur 7 ans de Chronique)

Technologies éducatives. Internet est né en dehors de l’école. Sa réussite est celle de la culture populaire. Cependant, les pionniers ont mesuré son intérêt pour l’éducation. Le réseau a bénéficié de l’acculturation permise par quinze ans d’informatique pédagogique (1985-2000). En classe, quand les effectifs sont adaptés, l’ordinateur et Internet ont trouvé leur place, souvent au service d’une pédagogie active (modules, ECJS voire TPE). Aujourd’hui, le vidéoprojecteur et le tableau numérique renforcent plutôt le cours magistral, alors que les élèves exploitent le cloud computing et le web 2.0. A la dernière rentrée, loin des annonces sur le « Tout Numérique », Internet a été convoqué pour travestir le retard de manuels conçus en flux tendus. Comme une vulgaire roue de secours.

Métier. Internet n’a pas révolutionné l’écriture de l’histoire (cf le programme ATHIS, Rolando Minuti). Le réseau a cependant modifié l’exercice du métier, pour le chercheur et pour l’enseignant : accès aux archives, diffusion des travaux des historiens (revues en ligne, radio en différé)... La vidéo en ligne joue un rôle croissant pour ceux qui enseignent une lecture distanciée de l’image. Mais à lui seul, Internet ne peut compenser le recul de la formation continue  ni faire oublier la suppression de la formation professionnelle en alternance : la pédagogie ne se réduit ni au « ludique » ni à « la tenue d’une classe ».

Listes de diffusion. Le réseau, pour nos disciplines, c’est un espace de travail à distance, où, hors du contrôle institutionnel, des professionnels mettent en commun leurs pratiques, leurs réussites et leurs doutes… Des listes de diffusion ( H-Français, Biblio-fr ), des forums ( Schoolhistory, SLN Geography…), des portails ( WebLettres ) ont préparé l’émergence de communautés numériques, avec leurs affinités et leurs inimitiés. Les outils du web 2.0 prennent la suite.

Traiter ou Communiquer. L’ordinateur est un outil exceptionnel dans le calcul et le traitement des données. Le succès de Google Earth est connu, tout comme sa combinaison du planétaire et du local. Géoclip illustre tout l’intérêt de la cartographie numérique. L’épreuve de croquis au bac a nourri un très intéressant travail d’équipe entre enseignants. Toutes ces productions ont alimenté les sites académiques, les blogs pour la classe et les sites indépendants, personnels ou associatifs.

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Les moins de 20 ans en Basse-Normandie - carte lissée - Sister - Géoclip

Liens. Internet est devenu une source documentaire incontournable, grâce à sa grande capacité d’archivage, au travail des internautes et aux liens entre les pages web. Des bases exceptionnelles complètent l’apport des manuels : Web Gallery of Art, Wikimedia Commons, Survol de France, Newseum… Le réseau fait entrer « le monde » à l’école, mais à la différence des manuels, il n’en fournit pas une lecture scolaire ; il met sur le même plan le loisir et le travail.

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http://lefredthouron.pagesperso-orange.fr/

L’énormité des contenus accessibles d’un clic peut submerger les élèves et perturber leur attention. Elle incite à réaffirmer le rôle de l’enseignant qui n’est plus celui qui « réinvente la roue », année après année. Elle souligne l’importance d’une veille documentaire collective, pour repérer les personnes ressources et écarter le bruit documentaire. Internet Archive redonne parfois vie aux adresses périmées…

Dans certains domaines, un réel effort serait nécessaire pour enrichir le web francophone en accès libre et gratuit. De plus, la France, pays réputé jacobin, gagnerait à harmoniser les adresses des sites éducatifs, sur le modèle du suffixe .edu utilisé par les universités aux Etats-Unis.

Valider. La fiabilité d’Internet est sans cesse questionnée, parfois davantage que la pédagogie qui accompagne implicitement son usage. Certains se contentent d’une validation hiérarchique. Enseigner la pratique d’une lecture distanciée est préférable, surtout face aux discours des médias. Le « virtuel » omniprésent, c’est en fait du « réel » : le travail des internautes, la circulation des idées sont aussi concrets que les prouesses techniques et leur financement par la société. L’obsession de la « nouveauté » mériterait également d’être analysée.

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Hans Holbein, Les Ambassadeurs, National Gallery, 1533, Web Gallery of Art

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Google Art Project donne accès à une reproduction en ultra haute définition
(zoom en haut à droite).
Le détail est impressionnant. Pas sûr qu'il soit essentiel à la lecture et à la compréhension du tableau.
http://clioweb.free.fr/art/ambassadeurs.htm

Droits. Des associations proposent des contenus dont les droits d’exploitation ont été négociés au préalable. De plus, pour l’image comme pour la vidéo, rien n’interdit de solliciter les auteurs et d’obtenir une autorisation pour des usages non commerciaux.

Controverses. Certains technophobes voudraient « débrancher l’école ». Selon eux, Google Books menacerait la lecture, Wikipedia incarnerait « l’erreur à haut débit », le web rendrait « encore plus bête » et conduirait vers « une dictature des idiots» … Après la télévision, Internet la nouvelle cible d’une presse qui oublie le sens de nuance, balançant entre l’extase et l’effroi. La légende noire se nourrit tantôt de la nostalgie des humanités et de Gutenberg, tantôt d’une allergie aux excès de la promotion commerciale ou des annonces institutionnelles. Plusieurs spécialistes, dont le regretté Roy Rosenzweig, ont souligné l’écart entre les discours et les usages sociaux concrets : la numérisation ébranle le système hérité des siècles précédents, mais le web n’a jamais empêché de penser, de lire et d’écrire.

Internet militant. De nombreuses associations dynamiques savent tirer pleinement parti de l’outil exceptionnel qu’est Internet, pour questionner, débattre, mobiliser - sans oublier d'archiver en vue du travail des historiens.. cf Matériaux n° 79 - 2005. Le réseau des réseaux est au cœur de nombreux enjeux civiques : respect des libertés individuelles, protection de la vie privée, situation des droits économiques et sociaux… Autant de thèmes à débattre en classe.
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La Chronique internet : http://clioweb.free.fr/chronique.htm


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03 avril 2012

Internet, un nouveau militantisme ?

 

rennes-cardon

Dominique Cardon, Christophe Allix, Benoit Thieulin - photo DL
internet en temps réel à la tribune ...

 

Internet, un nouveau militantisme ? Forum Libération, Rennes 2012

Dominique Cardon , Internet ou la politique par le bas - Libération 30/03/2012
Le sociologue a publié La démocratie internet. Promesses et limites, Paris, Seuil, 2010.

« Le web est devenu un nouveau moyen de communication et de mobilisation. Il favorise le désenclavement de la relation avec les militants pour l’ouvrir à un cercle plus large de sympathisants. Il peut accompagner les démarches de consultation participative initiées par les institutions publiques. Et il est en train de devenir le terrain d’action privilégié des stratégies de communications des appareils de campagne des candidats ».

« ... la force émancipatrice de l’Internet se joue sur un autre plan, celui de la libération des subjectivités des individus »
http://www.liberation.fr/medias/01012399350-internet-ou-la-politique-par-le-bas


Benoît Thieulin, La professionnalisation des militants, la démocratisation des sympathisants

« Des campagnes plus techniques avec des équipes professionnalisées »

« ... seule une minorité de citoyens va sur les sites de campagne ou se rend à un  meeting. Donc, disposer d’une base de mails de sympathisants, d’abonnés twitter ou de fans du candidat sur Facebook, devient stratégique »
http://www.liberation.fr/politiques/01012399352-la-professionnalisation


qq notes :
La référence obligée sur le sujet, c'est la campagne d'Obama en 2008. Il a supprimé la coupure entre campagne traditionnelle et campagne sur internet. Il a acheté moins de spots de pub. Il a préféré embaucher des community managers pour former et encadrer ceux qui ont été chargés de mobiliser les abstentionnistes.

En 2007, la campagne de Ségolène Royal a oscillé entre l'internet participatif (le pull, cf Désir d'Avenir, mobiliser, faire remonter des propositions et des argumentaires) et une pub plus classique.
Aujourd’hui, internet n'est pas au coeur de la campagne, sauf pour les petits candidats. La campagne sur internet est assurée par des pros, entreprises privées pour l’ump, salariés embauchés pour le PS. Tout ceci coûte cher, et produit du matériel normalisé qui fait peu vibrer les militants ou les électeurs.

Les sites des partis (le push) ont en général peu de succès. L'internet participatif et les blogs ont été actifs en 2007. Les médias sociaux sont à la mode en 2012.
La TV occupe toujours la place centrale, elle place le spectacle avant le débat d’idées, elle ne brille pas dans les usages de l’interactivité. D’où le calcul des communicants du sortant : saturer l’espace public avec une proposition par jour, un rythme adoré par la TV commerciale, mais sans intérêt pour l'électeur ordinaire, d’autant que les sujets sont des diversions (idéologie ou questions de société) qui tentent d'esquiver les vrais sujets (comme l’emploi, la santé, la fiscalité, l’éducation…)

Pour D. Cardon, les internautes les plus actifs ont compris que l’on peut changer la société sans prendre le pouvoir. Dans une campagne, l’essentiel ce sont les sujets qui peuvent transpercer le mur des conversations sur les réseaux sociaux. Mais l’impact ne dépasse sans doute pas le premier cercle, celui des militants très engagés.


Dans le débat, deux oublis relatifs :
- La politique ne se limite pas au temps et au cirque d'une campagne électorale.
- L'obsession de l'instant (le tweet) peut parfois faire oublier la durée (l'archivage sur le web de textes de référence).


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