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14 octobre 2016

LM : Face à l’histoire identitaire

 

Le Monde des livres,
spécial Rendez-vous de l'histoire, 30.09.2016

- Face à l’histoire identitaire, Etienne Anheim
http://www.lemonde.fr/livres/article/2016/09/28/face-a-l-histoire-identitaire_5005003_3260.html

extraits

Plusieurs parutions récentes prennent leur source dans une vision nationale et édifiante de la France (Sévillia, De Jaeghere, Casali)
« Nombreux sont ceux qui rêvent d'une école dispensant un catéchisme républicain ou national, au lieu d'une initiation aux sciences de l'homme et de la société. Cette conception instrumentale de l'histoire est même dominante dans les traditions scolaires, de droite comme de gauche ».

Pour les tenants d’une vision nationale et édifiante,  « leur histoire est événementielle, jalonnée de grands hommes et de moments forts qui sont autant de terrains d'affrontement avec ceux des historiens de gauche qui partagent leur focalisation pour le politique et sa mémoire. Les croisades, les rois, l'Empire, la Résistance, la guerre d'Algérie sont les passages obligés d'un récit dont la logique a deux ressorts. Le goût épique, tout d'abord, manifestant la fonction imaginaire d'une histoire qui s'adresse plus à l'âme qu'à la raison. Utiliser Saint Louis et Napoléon à cette fin n'est finalement pas très différent de lire l'Iliade ou Le Seigneur des anneaux. La passion du jugement de valeur, ensuite, qu'on retrouve également chez certains historiens qu'ils combattent. C'est le même " Tribunal de l'Histoire " qui condamne la monarchie ou la Révolution, la colonisation ou la Commune : seuls les juges changent ».

« Or, l'histoire, au sens scientifique du terme, n'est pas un procès. Elle ne relève pas non plus de la politique, de l'esthétique ou de la morale, mais des sciences sociales. Elle se caractérise par des méthodes et des procédures appliquées à des sources, par des hypothèses, des interprétations et leur discussion dans une communauté et des institutions savantes, enfin, surtout, par un horizon : comprendre et expliquer les sociétés humaines dans le temps et l'espace, à travers des travaux érudits, mais aussi des livres, des magazines, des expositions et des émissions destinées au grand public.
Cette histoire n'est pas partisane, ne donne pas de leçons et, pourtant, n'est pas neutre. Elle représente un point de vue, celui de la science, et accomplit une tâche liée au projet démocratique, celle d'essayer d'élucider le monde. Même si elle n'est pas étanche à la société qui l'entoure, à ses conflits et à ses valeurs, son projet intellectuel vise du moins à tenter de les mettre à distance pour construire un savoir autonome. Cette ambition scientifique, qui n'est pas toujours mise en œuvre au sein même de l'Université, mais à laquelle des historiens amateurs, des enseignants ou des lecteurs peuvent apporter leur pierre, est très différente de celle qui anime les auteurs de ces livres [nationalistes] ».

« Même si ces auteurs aiment à se considérer comme ... des minoritaires victimes de terrorisme intellectuel, le rapport au passé qu’ils promeuvent est aujourd’hui majoritaire dans la plupart des médias, les discours politiques et une grande partie de la population. Ils sont bien de leur temps et en ont adopté les pratiques : victimisation, utilitarisme du savoir, mise en scène du récit relevant du storytelling des communicants politiques, passion de l’évaluation des hommes et des choses, qui n’a rien à envier au management néolibéral.

En greffant leur vision idéologique sur un imaginaire hérité de l’histoire populaire d’André Castelot et d’Alain Decaux, ces ouvrages participent d’une révolution culturelle dans laquelle « l’histoire », c’est-à-dire une vision manichéenne du passé, tient une place essentielle. Cette histoire, ce n’est pas la nôtre ; elle en est même le contraire.

Pour le chercheur comme pour l’élève, l’histoire doit être un problème intellectuel stimulant, non une solution rassurante pour distinguer le bien du mal. Raoul Girardet, Pierre Chaunu ou Philippe Ariès, de vrais hommes de droite et de vrais historiens, l’avaient compris, aussi bien que Jean-Pierre Vernant, Jacques Le Goff ou Marc Bloch ».



- Egalement dans ce spécial Rendez-vous de l'histoire,

Un nouveau départ, Nancy Green sur l’ambivalence du mot Partir
http://www.lemonde.fr/livres/article/2016/09/29/les-rendez-vous-de-l-histoire-un-nouveau-depart_5005246_3260.html

A la conquête du fils du Ciel
Antonella Romano, Impressions de Chine, L’englobement du monde (XVI-XVIIe)

L’effort d’imagination, Alain Corbin, Sylvain Venayre
dialogue entre deux historiens en liberté.

Vichy, machine à dénaturaliser,
Claire Zalc, Les dénaturalisés. Les retraits de nationalité sous Vichy, Le Seuil

Comme un Allemand en France, lettres inédites sous l’Occupation

Une comédie des erreurs, Nell Zinck déconstruit le mythe de la famille US idéale
Comme les deux doigts de la main, Marta et Alan, E. et M. Guibert
Amélie Nothomb, joyeuse mystique



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