20 février 2014

La mixité dans l'Education

 

Antoine Prost vient de publier l’ouvrage « Du changement dans l’école ». Il combat le stéréotype selon lequel les enseignants seraient opposés à toute réforme. Dans l’entretien publié dans Libération 25.09.2013, il évoque un changement majeur mené sans bruit, celui de la mixité scolaire.

Deux ouvrages abordent ce sujet :
- Françoise et Claude Lelièvre, Histoire de la scolarisation des filles, Paris,1991 -
- Rebecca Rogers, La mixité dans l’éducation, Enjeux passés et présents, ENS Editions, 2004.

Chez les catholiques, le concile de Trente a réaffirmé l’attachement de l’Eglise à la séparation des sexes et des espaces. La droite religieuse s’oppose à la mixité, avec le soutien du Vatican (cf. l’encyclique de Pie XI en 1929).
Côté républicain, Condorcet a plaidé en faveur de la coéducation. Vers 1880, les républicains font le choix d’une scolarisation séparée, de « l’égalité dans la différence ». En 1936, les CEMEA appliquent la mixité ; ils sont suivis par les Francs-Camarades après 1945.

Dans les années 1960, face au gonflement des effectifs (du fait du baby-boom et de la prolongation de la scolarité jusqu’à 16 ans), l’administration comprend son intérêt : la mixité réduit les dépenses de construction ou le volume des salaires. Dans le secondaire, une circulaire est publiée en 1957, et la moitié des collèges sont mixtes dès 1964. En primaire, la circulaire de 1965 s’applique aux nouvelles écoles. La mixité concerne moins de 10 % des effectifs en 1961-62 ; elle en touche plus du tiers à la fin de la décennie, y compris dans le secteur privé. En 1975, la loi Haby la généralise. Mais les ENS n’ont suivi que dans les années 1980, longtemps après le choix pionnier de l’ENSET (Cachan).

Il existe des exceptions significatives. En 1956, Bourguenolles, une commune du sud Manche inaugure un nouveau groupe scolaire. Le couple d’instituteurs veut installer la mixité, garçons et filles en rangs séparés. Le curé (prêtre depuis 1904) et le conseil municipal s’y opposent. Les parents, habitués à la gémination au temps de la classe unique, se mobilisent et soutiennent les enseignants. L’inspection académique leur donne raison. Une fracture durable s’installe : aux élections municipales de 1959, la commune change de majorité ; le nouveau maire reste en poste pendant trente ans.

La mixité a permis aux filles d’accéder aux mêmes études que celles des garçons, mais il faut attendre 1982 pour voir une circulaire réclamer « une pleine égalité des chances ». En 2004, Nicole Mosconi constatait que « les programmes scolaires contribuent à persuader les élèves, filles et garçons, que les femmes n’existent pas dans la société, dans l’histoire et la culture ». La lutte contre les préjugés sexistes n’était donc pas terminée. Elle est même toujours d’actualité.

source : conclusion de la Chronique Internet n° 425
http://clioweb.free.fr/chronique/aphg425.pdf

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