Darknet et chevaliers blancs
Mythologies du darknet - Place de la Toile, 30.11.2013
http://www.franceculture.fr/emission-place-de-la-toile-mythologies-du-darknet-2013-11-30
L'émission Place de la Toile prend appui sur un Envoyé spécial 14.11.2013 dont la bande annonce est encore plus racoleuse que les précédentes : Darknet : le côté obscur du Net : « Le Darknet, c'est la face cachée d'internet. On y trouve de tout : drogues, armes, numéros de cartes de crédit. En toute liberté et dans l’anonymat total ».
Daniel Schneiderman - ... un bel avenir de mythologie terrifiante - Rue 89 15.11.2013
La darknet : Réalité ? Boursouflure journalistique habituelle ? Les grandes chaînes de télévision, depuis quinze ans, nous ont tellement – et France 2 au premier rang – habitués à la diabolisation d’Internet, ses pédophiles en liberté, ses marchands d’armes, ses garages à bombes artisanales, qu’il est désormais difficile de les croire sur le sujet, même quand par hypothèse elles diraient vrai.
http://www.rue89.com/2013/11/15/dark-net-mythologie-vient-247532
Ce type de propagande a plusieurs avantages pour la TV :
. Présenter ses sous-traitants comme des experts de l'information.
. Exploiter politiquement et commercialement les fantasmes les plus délirants et les plus anxiogènes.
. Vendre une image détestable d'un concurrent qui peut montrer les travers de certains médias peu scrupuleux.
Place de la Toile critique l'usage du terme. Il n'y aurait pas un darknet, mais des darknets.
A l'origine, le web est fondé sur la transparence : tout le monde peut tout voir, y compris les marchands et la police. Ce n'est que par la suite que les multinationales ont eu la prétention de capter tous les échanges sur internet et d'en tirer des profits exorbitants.
Jérémie Zimmerman souligne une inversion dont les communicants ont le secret : Pour Google et Facebook, comme pour la NSA, la vie privée n'existe plus. Ce qui ne les empêche pas de se présenter comme des chevaliers blancs.
En face, ceux qui utilisent le cryptage et l'anonymat pour échapper à ce type de surveillance généralisée sont présentés par eux comme des gangsters, des pédo-nazis ...
vers la 44e mn : Pour JS, la surveillance généralisée repose sur trois éléments : une hypercentralisation (de fait, Facebook sait tout sur tout le monde, FB est devenue la plus grande agence privée de renseignement dans le monde), des logiciels propriétaires (fermés, sauf pour la NSA et les concepteurs de virus) et une fausse impression de sécurité (le cadenas).
Face à cette privatisation de l'internet, à ce mépris des droits fondamentaux, JS propose un autre triptyque : des services décentralisés (où chaque internaute garde le contrôle de ses données), les logiciels libres avec accès au code source, la cryptographie (le chiffrement point à point).
La distinction est faite entre le(s) darknet(s) et le deep web, le web des profondeurs qui échappe à l'indexation par les moteurs de recherche. « En 2001, la taille du deep web était estimée à plus de 400 fois celle du web de surface ».
Darknet, l'article de Wikipedia
http://fr.wikipedia.org/wiki/Darknet
Darknet : immersion en réseaux troubles - Télérama, 14.09.2013
http://www.telerama.fr/medias/darknet-immersion-en-reseaux-troubles,102055.php
Qui a peur du grand méchant « Darknet » ? - Slate
Le darknet, un Internet «bis» sans foi ni loi ? ... « Une chose est sûre: «le darknet», sa mythologie et sa réalité, ressemblent plus au doigt qu'à la lune. Avant d'affoler le chaland, il faudrait peut-être commencer par regarder au bon endroit ».
http://www.slate.fr/monde/80471/qui-peur-du-grand-mechant-darknet
Techn0polis :
http://www.techn0polis.net/2013/11/28/a-propos-de-darknet-encore/
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Apprendre en ligne ?
Apprendre en ligne, est-ce possible ? - Rue des écoles, 27.11.2013
Patrick Weil vante les vidéos courtes (avec tableau noir et craie) mises en ligne par la Khan Academy dont il est le responsable pour la France.
Loriane Lafont, étudiante en littérature à l'ENS, a publié Misère et décadence des Grandes Ecoles - Confession d'une Khâgneuse atterrée (Editions Jean-Claude Gawsewitch, oct 2013). Elle répète les clichés habituels sur le plagiat, sur l'écran qui fait écran...
Des allusions sont faites à la fin des profs (cf la tribune amère d'un journaliste de Libération) ou les délires sur le prof unique (si possible du Collège de France) le web servant de TV scolaire de masse ( cf un entretien du Monde avec Murdoch... :-)
L'écran fait écran, c'est une formule paresseuse et stupide. Comment enseigne-t-on la géo sans appui sur les photos des lieux étudiés ? Comment étudie-t-on l'histoire de la peinture sans disposer de reproductions de qualité des tableaux ? (cf Le Web Gallery of Art pour profiter des commentaires que faisait Daniel Arasse)
Le cas de la première année de médecine est évoqué, comme illustration des dégâts du numérique.
Les amphis débordent (mais pas ceux des ENS, du fait du concours d'entrée) ? Le problème n'est pas celui du numérique. Mais celui de la massification dans le supérieur, celui d'une sélection brutale (par les maths) et d'un système qui refuse d'embaucher les universitaires nécessaires. Au moins une Fac a supprimé tous les amphis, et vend aux étudiants sur dvd les cours filmés en vidéo.
La future élite peut ainsi passer à côté des vrais enjeux politiques et sociaux.
Côté pédagogie, l'émission a souligné les limites du cours magistral universitaire.
Y a-t-il vraiment dialogue et interactivité dans le grand amphi de la Sorbonne quand plusieurs centaines courbent l'échine pour prendre en notes une parole unique ?
Le séminaire est le contre-modèle souvent vanté. Mais en ce moment, en dehors des ENS, quelle université dispose des moyens financiers pour généraliser les séminaires à 25 étudiants dans les premières années ? Est-ce possible de travailler à 25 par groupe sans porter les droits d'entrée à 10 000 livres ou à 30 000 $ ?
Le powerpoint a été à nouveau vilipendé. Sans doute par les excès dans l'usage du plan détaillé. Pas pour les supports visuels à analyser et commenter. Que se passait-il au temps des rétroprojecteurs quand un étudiant de phramacie avait 20 secondes pour noter l'ensemble de ce que comportait un transparent de chimie ? Avec le numérique, il peut retrouver ces données en ligne ou se servir d'un appareil photo.
Plutôt que d'opposer la Khan Academy à une pourrisseuse du web, n'aurait-il pas été possible d'inviter un professionnel de la formation à distance, d'évoquer les réussites (cf le rôle du CNAM) et les difficultés de cet enseignement, de réfléchir aux mutations permises aujourd'hui par la technologie ?
rappel : « La pédagogie est-elle dématérialisable ? »
Hervé Gardette a posé la question dans l'émission du Grain à moudre 27 nov. 2012
http://clioweb.canalblog.com/archives/2012/11/27/25683278.html
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