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12 mars 2010

Filmer les camps

Dans La Fabrique de l'histoire, ce matin (ou en version mp3)
à la question d'E Laurentin, « A quoi sert l’histoire ? », André Burgière répond par la citation de Lucien Febvre :« L’histoire qui sert est une histoire serve ». La formule lui permet de dire sa méfiance à l'égard de l’historien qui se laisse porter, pour de bonnes raisons, par les demandes de son temps. Il vante à l’opposé les démarches de Raul Hilberg ou de Jean-Louis Flandrin, qui ont inventé leur sujet et constitué leurs sources, avant de conclure…« En nous arrachant à nos certitudes, ils ont renforcé notre capacité à critiquer l’ordre du monde. C’est à cela que doit servir l’histoire ».

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Autour de La Rafle et de l’expo « Filmer les camps », écouter un échange très intéressant sur la relation du cinéma à l’histoire (et à la mémoire), sur les pratiques de la classe, sur les termes des débats récents à propos de l’histoire de la 2GM.

vers la 21e mn - Sylvie Lindeperg, en substance : « La Rafle est un film de son époque. Notre société iconogène ne supporte pas qu’un événement majeur puisse n’avoir aucune traduction visuelle dans les archives. Il lui faut absolument le mettre en images ». L'idéal serait la fiction, comme art de l'allusion ou de l'ellipse. La réponse, c'est souvent le téléfilm et la docu-fiction : dans une esthétique du trop plein, les réalisateurs veulent tout dire et tout montrer, comme s'ils estimaient que le spectateur n’est pas capable de sentir et de penser par lui-même.

JF Bossy a rappelé utilement le rôle de la durée : Nuit et Brouillard, c’est 35 mn, Shoah c’est 9 heures, plus que le temps imparti à toute la guerre mondiale dans les instructions (à l’origine, Lanzmann n’envisageait qu’une vision intégrale…).
JFB suggère que l’exploitation de Nuit et Brouillard était un moment exceptionnel (un rite).
Détail 1 : pour le projeter , il fallait un projecteur 16 mm. Cet appareil servait à exploiter d’autres œuvres prêtées gratuitement par les CRDP.
Détail 2 : en 16 mm, les copies étaient en noir et blanc et de qualité médiocre ; l'arrêt sur image était difficilement pensable. Quelle différence avec la classe d'aujourd'hui, aussi bien pour la technique (vidéoprojecteur) que pour la possibilité, pour le prof d'histoire, de lire Sylvie Lindeperg et de mettre en contexte l'œuvre et les images !
http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/fabriquenew/archives.php

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- L'émission fait allusion à la privatisation de la production des documents pédagogiques qui accompagnent la sortie des films commerciaux, "adoubés" ou non par le MEN.

- Les acteurs et la mémoire. Lors de la promotion d'un film, les acteurs mettent souvent en avant leur ignorance du passé, une lacune que seul le tournage aurait fait disparaître. Pourtant, dans ce film, toute l’équipe se sent investie d’une mission morale. Les témoins disparaissant, les acteurs se voient comme des passeurs de mémoire ("en fait d’autre chose que de la mémoire").  Tom Hanks est invité aux commémorations, les médias lui demandent de se prononcer sur l’histoire du débarquement...

- Nuit et Brouillard se plaçait dans un contexte universaliste (on n'y prononce pas le mot "juif", ni "allemand"), mais le képi censuré fin 1955 à la demande de la gendarmerie confirme que Resnais avait bien la préoccupation de pointer la responsabilité de la France dans la déportation.

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L’horreur plein cadre
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L'exposition Filmer les camps est présentée dans une double page de Libération
et par Christian Delage, le commissaire de l'exposition, sur le blog Culture visuelle.
Le Monde Magazine publie "De Hollywood à Nuremberg" 13 mars 2010.

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source : George Stevens - D-Day to Berlin (1994) - Le dvd est en vente.
La libération de Dachau, un extrait de 4 mn est disponible sur Dailymotion

. Cinéma et nazisme (1939-1945), une liste de films établie par Michel Antony
http://artic.ac-besancon.fr/histoire_geographie/HGFTP/autres/Cinema/cinegeno.doc

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. La rafle, un dossier pédagogique en pdf
. Il y a soixante ans. La rafle du Vélodrome d’Hiver - La brochure conçue par Adam Rayski (15 Mo en pdf)
. Claude Lévy et Paul Tillard, La grande rafle du Vél' d'hiv', Robert Laffont 1967, réédité chez Tallandier

rafle_vdh

La rafle du Vel d'Hiv - 17 juillet 1942
Les cars "de la section spéciale" le long du Vélodrome d'Hiver.
(Anonyme, © Bibliothèque historique de la ville de Paris / Keystone).

14/03/2010 : Cinéma : Le retour de la seconde guerre mondiale et ses paradoxes - Le Monde Opinions :

« Une reprise de flamme a pourtant lieu aujourd'hui sur les écrans, avec la sortie d'un nombre important de films consacrés plus ou moins directement à cette sombre période » :
Walkyrie, de Bryan Singer
Les Insurgés, d'Edward Zwick
Katyn, d'Andrzej Wajda
Inglourious Basterds, de Quentin Tarantino
L'Armée du crime, de Robert Guédiguian
Vincere, de Marco Bellocchio
Shutter Island, de Martin Scorsese
Liberté, de Tony Gatlif
L'Arbre et la Forêt, d'Olivier Ducastel et Jacques Martineau
Les Convois de la honte, de Raphaël Delpard
La Rafle, de Rose Bosch
« La question de la mémoire de la 2GM, à l'heure de la disparition des témoins, est d'autant plus sensible qu'elle devient celle d'une transmission à la fois plus instruite et plus incertaine ».

bibliographie :
Jean-Michel Frodon (dir) Le Cinéma et la Shoah : Un art à l'épreuve de la tragédie du 20e siècle  (Cahiers du cinéma 2007)
http://www.nonfiction.fr/article-585-lethique_de_la_representation.htm

Claudine Drame Des films pour le dire : Reflets de la Shoah au cinéma. 1945-1985 + 1DVD Métropolis 2007

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