Désobéir, Thierry Paquot, Le Monde diplomatique 2005
https://www.monde-diplomatique.fr/2005/01/PAQUOT/12016
Henry David Thoreau 1817-1862
https://fr.wikipedia.org/wiki/Henry_David_Thoreau
La désobéissance civile
https://fr.wikipedia.org/wiki/La_D%C3%A9sob%C3%A9issance_civile
https://fr.wikisource.org/wiki/La_D%C3%A9sob%C3%A9issance_civile
Civil Disobedience, Henry David Thoreau, 1817-1862
https://en.wikipedia.org/wiki/Civil_Disobedience_(Thoreau)
Art. X.—RESISTANCE TO CIVIL GOVERNMENT.
https://en.wikisource.org/wiki/Aesthetic_Papers
https://en.wikisource.org/wiki/Aesthetic_Papers/Resistance_to_Civil_Government
« Occuper une usine afin d’empêcher les déménageurs, à la solde du patron qui délocalise, d’emporter les machines ; arracher les plantes génétiquement modifiées pour protéger la santé de chacun ; marier des homosexuels ; siéger en silence dans une assemblée ou occuper pacifiquement la chaussée le temps d’un sit-in sont quelques-unes des actions politiques que l’on associe bien souvent à la « désobéissance civile ». Une attitude pas si nouvelle que cela...
Un jour de juillet 1846, à Concord (Massachusetts, Etats-Unis) — où il était né en 1817 —, Henry David Thoreau croise Samuel Staples, gendarme municipal, qui lui réclame le montant de ses impôts et s’apprête même à lui avancer l’argent nécessaire pour s’en acquitter. David Thoreau, qui réside depuis près de deux ans dans une cabane au cœur de la forêt de Walden et qui se rend à la ville pour récupérer ses souliers chez le cordonnier, est quelque peu interloqué. Il rétorque qu’il refuse, par principe, de verser de l’argent à l’Etat alors même qu’il est en désaccord avec la politique de cet Etat et qu’il ne souhaite absolument pas contribuer à financer la guerre contre le Mexique. Il est donc arrêté et doit passer la nuit au poste, malgré le versement de l’impôt par une « mystérieuse » femme (certainement sa tante, Maria Thoreau).
Plutôt populaire dans cette bourgade convertie aux idées novatrices de Ralph Emerson (1803-1882) et des intellectuels gravitant autour de lui et de la revue The Dial, David Thoreau se doit de relater son expérience et d’argumenter son acte. Il rédige « La relation de l’individu à l’Etat », texte qu’il présente lors d’une conférence à Concord en janvier 1848. Elizabeth Peabody — belle-sœur du romancier Hawthorne — la publie dans sa revue, Aesthetic Papers, en mai 1849, sous le titre de « Résistance au gouvernement civil », qui, dans les œuvres complètes de Thoreau publiées après sa mort en 1862, deviendra La Désobéissance civile . Ce texte polémique, à dire vrai, tomba vite dans l’oubli, et Thoreau lui-même n’y fit plus référence.
Plutôt populaire dans cette bourgade convertie aux idées novatrices de Ralph Emerson (1803-1882) et des intellectuels gravitant autour de lui et de la revue The Dial, David Thoreau se doit de relater son expérience et d'argumenter son acte. Il rédige « La relation de l'individu à l'Etat », texte qu'il présente lors d'une conférence à Concord en janvier 1848. Elizabeth Peabody - belle-soeur du romancier Hawthorne - la publie dans sa revue , Aesthetic Papers, en mai 1849, sous le titre de « Résistance au gouvernement civil », qui, dans les oeuvres complètes de Thoreau publiées après sa mort en 1862, deviendra La Désobéissance civile (1). Ce texte polémique, à dire vrai, tomba vite dans l'oubli, et Thoreau lui-même n'y fit plus référence.
Cest Léon Tolstoi qui, on ne sait trop comment, le lut et invita les Américains, dans une lettre publiée par la North American Review, au début du XXe siècle, à renouer avec cette attitude courageuse et exemplaire d'un individu osant affronter l'Etat lorsque celui-ci fait fausse route. Peu auparavant, un étudiant indien à l'université d'Oxford, Mohandas K. Gandhi, végétarien, se rapproche d'autres végétariens, dont Henry S. Salt, biographe de Thoreau, qui lui prête cette brochure. Gandhi est enthousiasmé et, devenu avocat en Afrique du Sud, la publie dans sa revue, Indian Opinion, le 26 octobre 1907. Par la suite, et jusqu'à son assassinat en 1948, il ne cessera de prôner la désobéissance civile, qu'il associe à la pratique de la non-violence.
Thoreau a été impressionné par Bronson Alcott, citoyen de Concord peint par sa fille Louisa May sous les traits du docteur March dans Little Women, qui déclarait haut et fort sa décision de ne pas régler son impôt tant que son gouvernement ne mettrait pas un terme à l'indigne politique esclavagiste. On raconte qu'un squire Samuel Hoar régla la note, mais l'essentiel est ailleurs : l'idée qu'un seul citoyen puisse se dresser contre son gouvernement, en son âme et conscience, afin d'être en accord avec les principes constitutifs de son Etat était définitivement reconnue.
C'est cette idée que va, à son tour, revendiquer David Thoreau. Dans les premières lignes de son libelle, il indique à quel point la présence d'un quelconque gouvernement correspond à un déficit de conscience chez les citoyens. « La seule obligation qui m'incombe, à juste titre, affirme-t-il, consiste à agir en tout moment en conformité avec l'idée que je me fais du bien. » Plus loin, il illustre ce principe moral en expliquant qu'une nation dite « libre » ne peut avoir un sixième de sa population réduit à l'esclavage et qu'il est par conséquent « grand temps pour les honnêtes gens de se rebeller et de songer à la révolution ».
Comme il existe des lois injustes, le juste trouve sa véritable place en prison, près des victimes d'un gouvernement inique, Quant aux fonctionnaires qui veulent servir le bien, ils se doivent de démissionner ... Thoreau avoue payer volontiers la taxe pour l'entretien des routes ou pour l'école, mais il n'admet pas de financer une guerre, qui, de fait, contribue à renforcer les Etats du Sud esclavagistes ».
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